Nos itinéraires de développement personnel sont une succession de hauts et de bas. En regardant le rétroviseur de votre propre parcours personnel et professionnel, vous aurez une mosaïque d’expériences qui vous ont propulsé vers le haut, comme vous verrez des challenges, moins excitants qui vous ont tiré vers le bas, vers l’échec, vers des erreurs, ou vers de l’amertume. La dualité négatif-positif est omniprésente dans ce rétroviseur, mais remarquez-vous que la notion de « haut » n’a de valeur que parce que la notion de « bas » existe ?
Cette dualité est ce que j’ai aussi appris de mes trajets à vélo depuis mon jeune âge. Fasciné par cette passion, intéressé par la découverte de ma ville natale, je traversais les ruelles et les quartiers, d’une manière continue avec un vif esprit de découverte. A chaque fois, et après 1 ou 2 heures de trajets, l’épuisement physique commençait à se faire ressentir au niveau de chaque partie de mon corps : souffle, articulation, muscle … et mon réflexe était d’essayer, au mieux, d’optimiser mes trajets pour chercher des passages plats et éviter les montées : un réflexe, que je dirais, bien naturel face à l’adversité, l’être humain cherche à optimiser plus, à économiser son énergie, et à sauvegarder des acquis. Malheureusement, et dans ma ville natale en particulier, la notion d’itinéraire plat n’existait que très rarement : malgré mes tentatives, je faisais automatiquement face à des montées et à des descentes. C’est bien le prix à payer pour explorer la ville et tirer satisfaction de mon activité.
Après plusieurs tentatives d’optimisation des montées et des descentes, je me suis rendu compte d’un phénomène qui se répétait devant moi d’une manière persistante : en faisant du vélo, et après chaque montée, il y avait bien une descente, et après chaque descente il y avait bien une montée. Je ne pouvais pas monter d’une manière indéfinie, comme je ne pouvais pas descendre d’une manière indéfinie. A partir de cette prise de conscience, ma perspective avait totalement changé vis-à-vis de la dualité « haut – bas » et « négatif – positif ». Quand je faisais face à la difficulté d’une montée, je m’attendais à savourer la « relaxation » de la descente. C’est bien là la dualité de nos itinéraires de développement personnel et professionnel, aucune crise n’est durable et aucune mésaventure n’est infinie. Quand votre état d’esprit reconnait que la succession « difficulté – réussite » est bien naturelle, vous traverserez vos trajets avec plus de sérénité. Dès lors, vous aurez cette conviction que les difficultés sont momentanées et que votre énergie dépensée pour transcender les pentes difficiles est récupérable par la suite : les descentes vous permettront de déguster des moments de relaxation et de plénitude. Le charme de ces moments n’est là que parce que vous étiez épuisés par les pentes ascendantes d’avant, et c’est bien cet état d’esprit que je souhaite vous recommander quand les situations que vous traversez sont difficiles.
D’un autre côté, si vous avez l’habitude (ou la chance de traverser) des trajets à vélo sur des trajets plats, demandez-vous si vous ne ratez pas des choses si vous ne pensez pas à expérimenter des trajets plus imprévisibles, plus difficiles, plus inconnus : des pistes accidentées, des falaises, des trajets sur sable, … imaginez votre attitude quand vous allez le faire. Sur des surfaces plates, vous arrivez certainement à affuter votre efficacité, votre vitesse, votre endurance. Mais sur les itinéraires imprévisibles, vous allez bâtir votre agilité et votre savoir agir. Si vous avez l’habitude des environnements stables, prévisibles et réguliers, dites-vous que le monde évolue tellement vite que vous devriez vous préparer pour affronter plus d’incertitudes et plus d’aléas. Ce sont bien les situations difficiles qui nous forment et transforment. Ce sont bien les exercices difficiles qui nous permettront d’apprendre de nos challenges et de renforcer nos capacités. Nous devons être très reconnaissants à nos échecs beaucoup plus qu’à nos réussites: « Les crises, les bouleversements et la maladie ne surgissent pas par hasard. Ils nous servent d'indicateurs pour rectifier une trajectoire, explorer de nouvelles orientations, expérimenter un autre chemin de vie. » comme dirait Carl Jung.
Les échecs sont aussi des opportunités d’explorer le sens profond de la limite de notre énergie, de remettre en question certains de nos états d’esprit, et de relativiser. Sans les échecs, nous ne sommes pas capables de tester nos limites. Faire une « pause » autour des échecs et en tirer les bonnes leçons est toujours important : m'étais-je bien préparé ? aurais-je surestimé mon énergie pour aller au-delà de cette pente difficile ? étais-je démoralisé et n'arrivant pas à voir le bout du tunnel? y avait-il un sens à ce que je prenne ce trajet depuis le début ou fallait-il que j'en prenne un autre plus pertinent ? …
En parcourant les échecs, vous allez vous parcourir vous-mêmes. Ceci dit, je vous recommande de ne pas le faire à « chaud », parce que vos interprétations seraient certainement biaisées par les sentiments du moment : frustration, amertume, rage, déception feront que ce que vous comprendrez de vos échecs ne sera qu’une partie très infime de ce que vous devriez explorer. Évaluer un échec ou un challenge ne devrait se faire qu’à « froid », une fois le calme est de retour, une fois votre environnement est plus serein, une fois certaines de vos routines sont en place : c’est bien le bon moment de réfléchir. Ceci peut se produire quelques mois et mêmes quelques années après les échecs / les challenges que vous avez auriez endurés. Effectuez cet exercice d’une manière à voir ce que vous avez appris, et non ce que vous auriez dû faire différemment, regardez ce que vous aviez traversé et ce que vous aviez bien pu en tirer en tant que profit, et surtout sur quoi vous aviez pu capitaliser dans des expériences qui ont suivi par la suite. En faisant cet exercice, vous allez être reconnaissant à tous vos échecs et même aux personnes qui vous ont mis dans des situations difficiles. Grâce à eux, vous aviez appris des choses sur vous-mêmes, vous êtes devenus plus forts et éventuellement plus résilients.
Par Farid Yandouz
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